Salut à tous,
Toujours plus Sud pour retrouver Emilie à Catane. Juste avant, escale très agréable à Acitrezza, petit port de pêche tranquille qui n’a l’air de rien et pourtant c’est là qu’Ulysse a eu maille à partir avec le Cyclope.
…..Cet horrible Cyclope avait capturé Ulysse et son équipage, avait déjà dévoré six de ses compagnons avant qu’Ulysse ne lui crève son œil unique et réussisse à se sauver avec ses copains….Fou de douleur et de colère, le Cyclope, maintenant aveugle, a envoyé d’énormes rochers en mer, pour tenter d’écraser, en vain, les fuyards…..Ces rochers, pinacles volcaniques, sont toujours là, à l’entrée du port ! Comme à chaque fois qu’Ulysse est dans le coin , on pense à « Spirou » et à son équipage…..
Mais aussi, c’est à Acitrezza que Visconti a tourné un film-documentaire poignant sur la dure vie des pêcheurs misérables d’ici : « La terre tremble », avec uniquement les gens du village comme acteurs !
A Catania, étape de 2 jours à la marina conseillée par les amis, pour accueillir Emilie….et journée mémorable en attaquant l’Etna par sa face Sud et en montant jusqu’au cratère principal en activité, à 3300 m….. Crapahut d’une journée dans un décor impressionnant de laves refroidies, de scories, de lapillis, où le noir domine, avec les fumerolles de souffre qui vous dégagent, ou plutôt vous agressent les bronches, et des fumées blanches de vapeur d’eau qui sortent du sol brûlant… Certes, pas d’explosions, ni de laves en fusion ( et heureusement !), mais des moments inoubliables dans ces paysages lunaires ! Et mes vieux genoux ne sont pas prêts d’oublier !
Le lendemain, ballade dans le marché coloré, animé, grouillant de vie, au milieu des cris et de la foule…et en profiter pour acheter quelques tranches d’espadon et se régaler comme jamais avec du poisson !
« J’aimerais tant voir Syracuse…… », et il a bien raison, Henri Salvador, car Syracuse vaut le voyage : son théâtre grec, creusé dans le calcaire, le plus beau en dehors de la Grèce, son amphithéâtre romain (reprenez vos définitions de théâtre et amphithéâtre…vous aurez des surprises !), ses latomies (carrières servant de prison) où la vie ne devait pas être des plus gaies pour les prisonniers….sa vieille ville, ses ruelles, ses monuments…..Oui, Syracuse est un enchantement !
Et pour revenir aux réalités marines, encore une histoire de mouillage rock’n roll à vous mettre sous la dent! A Syracuse, on accoste à la Méditerranéenne, c'est-à-dire qu’on est perpendiculaire au quai (nez ou cul au quai), et pour rester dans cette position perpendiculaire, on a, au préalable, mouillé une ancre à quelques distances du quai, sur laquelle on s’accroche bien, tous les bateaux étant alignés les uns à coté des autres…… mais voila que le vent monte sérieusement, (25 nds) évidemment il est minuit, et une vedette italienne (encore !!...) dérape sur son ancre, commence par venir s’appuyer sur son voisin, un voilier américain, et voulant se dégager au moteur, drague avec son ancre le mouillage de l’américain, qui, à son tour libre de l’arrière, vient bousculer le petit voilier qui est à coté de nous et qui s’appuie sur Wadi Rum….le principe des dominos qui tombent les uns sur les autres….. mais WR est bien ancré, et résiste vaillamment à la charge imposée……mais le pauvre skipper de la vedette, paniqué et seul à la manœuvre , laisse son bateau venir contre l’arrière de WR, avec le risque majeur, ou d’embarquer aussi, notre ligne de mouillage avec son ancre qui racle toujours le fond, ou carrément de la couper (câblot textile !) avec son hélice….. 1/2h de lutte pour qu’il ne touche pas notre arrière, en le suppliant (en gueulant !) d’aller se dépatouiller de tout ce qu’il a ramassé plus loin…..mais la barrière de la langue et le stress de ce pauvre gars ne simplifient pas les choses….. en fin de compte il s’éloigne, et notre mouillage tient !! Et chacun de remettre de l’ordre dans sa position….. Le tout, sous les yeux ravis des promeneurs sur le quai, au spectacle pour de vrai !
Retour à Acitrezza, et nous conduisons, assez tristounets, notre Emilie à l’aéroport à Catane…..
Nous attendons ici une météo plus favorable pour aller vers l’Est, en compagnie de Tommy et Lotte sur leur bateau « June » qui porte un beau et grand pavillon rouge barré d’une croix blanche. Ils sont danois, et naviguent depuis 11 ans en Méditerranée, avec seulement 3 retours brefs au pays…. ! Ils parlent français et sont très sympas, et le temps passe tranquillement. Lui, grand gaillard blond de 70 ans, solide et souriant, belle gueule de Viking, elle, gérant tout sur le bateau, comme une fourmi, tous les deux plein d’expérience!
Enfin, au 4°jour, à 3h du matin, sous un ciel étoilé superbe, mais avec encore des éclairs à l’horizon, nous avons quitté silencieusement ce petit port sympa, non sans avoir quand même réveillé notre ami Tommy qui nous salue du quai….Cap au NE vers la semelle de la botte calabraise…..le moteur fonctionne toute cette longue journée, comme d’habitude, vent trop faible ou de face. Rocella Ionica puis Le Castella…. Avec un beau château aragonais très (trop ?) retapé, sur un îlot. Il n’a pas empêché, le fameux pirate algérien Barberousse, en 1536, de le prendre, de le brûler, et d’emmener les femmes et les enfants en esclavage…..les hommes étant probablement passés par les armes ! On ne plaisantait pas à cette époque, et les pirates ravageaient toute la Méditerranée, c’était une menace majeure permanente partout.
Là, on est bloqué par un coup de Nord de 7 avec des rafales à 8 qui font gîter le bateau sur place ! Ce vent s’appelle ici la Tramontana, et le Grecale (le Grec) quand il passe à l’Est. D’ailleurs la température est descendue brusquement à 14° le matin…on se les caille ! Les polaires sont de sortie, comme les bermudas à manches longues ! Bref, c’est l’automne ici aussi, malgré le soleil. On passera 4 jours à Le Castella à attendre une météo favorable. Temps mis à profit pour réviser une nouvelle fois le dessal qui « disjoncte », pour nettoyer le bateau et bricoler diversement.
Une nuit, Charles, notre voisin gallois qui navigue en solo sur un voilier de 9m, vient demander de l’aide à 5h du matin…. Sous le vent fort, un bateau de promenade a rompu une amarre et est en train de taper sur les rochers, ainsi que la vedette qu’il a à couple…. C’est le bruit des 2 bateaux cognant sur les rocs qui a alerté notre ami…. Et nous voila tous les trois , dans le froid de la nuit, à ramarrer les embarcations en goguette ….Vous voyez, même dans un port abrité, il y a du spectacle !
Enfin, le mardi 16 octobre on reprend le large, malgré une mer encore agitée et houleuse, mais sans vent ! Escale à Ciro Marina …. Pauvre Calabre, c’est vraiment le sud du sud de notre Europe…. A Ciro , la communauté européenne a permis de construire un port magnifique, il y a moins de 10 ans . Il est déjà en ruine…..Eclairé par d’immenses lampadaires genre terrain de foot, qui devraient faire le jour au milieu de la nuit…un seul projecteur (sur 6) d’un seul lampadaire (sur 5) fonctionne…leur béton semble être uniquement de sable et tout s’effrite déjà….tous les circuits électriques sont éventrés ….un seul point d’eau (avec fuite chronique)… Quelle désolation ! Y a du boulot !
A l’aube Wadi Rum quitte son quai délabré pour traverser le golfe de Tarente, réputé pour ces coups de tabac violents. La météo est satisfaisante, on ne traîne pas : toujours vent faible de face, et « mare mosso » c'est-à-dire agitée …cap sur Gallipoli ! On est dans le talon de la botte. Gallipoli est une vieille ville que nous trouvons presque aussi belle que Syracuse , bien qu’elle aie beaucoup moins de beaux monuments, mais elle est plus populaire et plus authentique.
Nous sommes le long du quai, derrière un voilier suédois….mais sur le quai des pêcheurs, et au retour de notre ballade en ville , un chalutier s’est garé juste derrière nous, et on constate qu’il a donné un coup à nos panneaux solaires,, il y a peu de dégâts, mais c’est désagréable. (Il faut reconnaître que Wadi Rum n’est sûrement pas à sa place !)
C’est d’ici que nous envoyons ce message, le dernier aussi dense, car nous voila à la fin de notre 5° mois de vagabondage…. Et la vie n’est plus aussi agréable : les jours sont bien plus courts, il fait plus froid, la météo devient hivernale et plus sévère …. Encore une escale italienne, puis les eaux territoriales grecques avec Corfou puis Preveza où Wadi Rum passera l’hiver. Mais on vous racontera bientôt ce dernier épisode
On vous embrasse tous JJ et S
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