Kalispera, bon après-midi ou bonsoir selon l’heure.
J’avais bien dit, la dernière fois, qu’on ferait attention à la météo…! Mais, ici, elle est imprévisible, je me répète… On part de Koroni pour traverser le golfe de Méssenie et doubler le cap Tainaro (ou Matapan)… au moteur… puis le vent monte, super ! On envoie GV (grd-voile) et génois… en plus on l’a dans le… dos ! Le pied ! On file à plus de 6 nds ! On se régale, sous un soleil qui ne nous quitte pratiquement pas depuis deux mois… (oui, je sais, ça vous énerve… mais prenez en votre part !)… puis ça monte encore… (force 6) plus de 20nds… 1 ris… 2ris… réduction du génois… nous voila à force 7… ça devient sportif mais reste amusant… le loch affiche jusqu’à 7,9 nœuds… la mer, à l’approche du cap est de plus en plus mauvaise, creuse, déferlante, une vraie marmite… le vent atteint des rafales à 8… là on s’amuse plus vraiment, bien qu’il n’y ait aucun danger, rassurez vous ! Et tout ça sous un ciel bleu imperturbable et un soleil radieux... mais on est bien content, le cap passé, d’entrer dans la petite baie de Porto Kayo sous 37 nœuds, et que la pioche accroche tout de suite ! Au milieu de tous les autres voiliers venus se blottir là. On a fait un excellente moyenne : + de 6,5…
Voila, ça, c’est pour les copains voileux, pour les mettre un peu dans le bain avec nous.
Pour vous autres, les terriens, sachez qu’on a abordé les côtes sauvages du Magne, arides, dénudées, toutes en montagnes pelées, couvertes d’un maigre maquis épineux et peuplées, si peu, de rudes montagnards, les maniotes. C’est la pointe du " milieu " sur votre carte du Péloponèse. On a voulu en savoir davantage. On remonte jusqu’à Gythion, le port de Sparte du temps de sa splendeur ! Location d’une petite voiture et découverte de ce rude pays. Imaginez des montagnes de rocailles, avec une pauvre végétation de buissons d’épines, quand la terre n’est pas carrément à nue, brûlée par les incendies. Et des villages, des hameaux plutôt, toujours juchés sur un piton rocheux, donc chaque maison est une tour, un véritable donjon de château fort, qui leur donne des allures de ksar marocain ou de château cathare, en pierres grises. Parce que, les maniotes, ils n’aimaient pas les étrangers, mais ils se supportaient entre eux, très difficilement, vivant en clan, avec un sens particulier de l’honneur, pratiquant la vendetta, et se tirant dessus d’une tour à l’autre ! Ca vous fait penser à la Corse, hein ? Celle d’avant, bien sûr ! Hé bien, justement, les Grecs installés à Cargèse, se sont des exilés maniotes du village d’Itilo, qui, persécutés par les Slaves ont demandé asile à la république de Gênes, alors maîtresse de la Corse ! (Pensée pour nos amis Michelle et Christian, amoureux de Cargèse… !)
Belle balade, émaillée aussi de superbes minuscules chapelles byzantines du 11° et 13°, aux fresques bien conservées, et de restes de châteaux francs construits par… ? Gagné ! Toujours notre Guillaume de Villehardouin !
Ah ! détails d’importance : le crin-crin incessant des cigales et les odeurs de maquis. Le Sud quoi !
Au retour les canadairs tournoyaient dans le ciel… ça brûlait dans les collines voisines !
A Gythion, il y a une petite île qui s’appelle Kranaï… Or, il y a bien longtemps, Pâris, fils de Priam, roi de Troie était reçu par Mélénas, roi de Sparte, marié à Hélène, superbe créature… Et, ce coquin de Pâris ne put résister au charme d’Hélène, et, enfreignant les règles les plus élémentaires de l’hospitalité et du savoir vivre, il la dragua ! Et elle trouva ça super ! Ils se sauvèrent de chez Mélénas, pauvre cocu, et leur première nuit d’amuuur se passa sur l’île de Kranaï ! C’est-y pas romantique ça ? Ouais, mais ça a déclanché la guerre de Troie, tout simplement !!
Puis Wadi Rum se rapproche de la dernière difficulté réputée… le passage du mythique cap Maléas… la pointe Est du sud du Péloponèse. Ulysse, lui-même en garde un mauvais souvenir… il rentrait chez lui, peinard, après voir fait du bon boulot pendant la guerre de Troie (justement !) quand, au passage de ce cap Maléas, le vent l’a envoyé au-delà de Cythère, vers le pays des Lotophages…
Et le scénario navigation raconté au début de ce chapitre se reproduit, pour aller de Gythion à l’île d’ Elafonissos, où il y a un mouillage sûr pour attendre que le vent donne son accord pour passer le cap Maléas vers l’Est. Wadi Rum arrive péniblement, par force 7, avec des rafales à 8, vent dans le nez pour le dernier bord, devant la superbe plage du sud de cette île… sable blanc, eau turquoise, mais décor de collines désertiques. Et ce putain de meltem qui souffle sans arrêt entre force 4 et 6 avec souvent des périodes à 7 ! .
Nous voilà donc au mouillage, l’ancre tient bon, heureusement, bien plantée dans le sable, car on va passer, au moins, 2 à 3 jours ici, balayés par un vent permanent établi, qui se calme à peine la nuit. Comme on est près du rivage, où se bronzent des beautés, mâles et femelles, nues (y en a pour tous les goûts !), il n’y a pas de vagues et le bateau accepte ce vent constant simplement en tirant des bords sur sa chaîne… On s’arme de patience et on attend une météo favorable… Et je ne tiens pas à quitter le bord, si ça montait encore plus pendant notre balade à terre, et que l’ancre chasse… !
Parce que c’est bien le meltem, un peu en avance cette année qui perturbe notre programme. On espérait faire un saut du Péloponèse à Milos, SW des Cyclades et remonter par Sifnos, Serifos, Kithnos et Kéa pour rejoindre le golfe Saronique et retrouver Malène et Hélène le 9 juillet comme prévu ! C’est loupé pour ce coup là, on longera donc, dès qu’on aura la permission de monsieur Meltem, le Péloponèse par Monemvassia, Nauplie, Spetsai, Idhra…
Enfin, à l’aube du 5° jour, Wadi Rum lève l’ancre. C’est vraiment l’aube, il est 5h du mat ! Comme prévu par la météo le vent s’est calmé, c’est au moteur qu’on progresse ; comme pas prévu par la météo, on passe ce fameux et redouté cap Maléas par un vent qui monte déjà, bien sûr, " in the nose " et on termine avec 25 nds, force 6, à Monemvassia, au lieu des 10 annoncés ! Ca ne facilite pas les accostages !
Maintenant on s’attend à tout avec le vent d’ici ! Des amis dans les Cyclades ont pris 60 nds, c’est force 11, ça s’appelle " violente tempête ", juste avant " l’ouragan " ! Et ils ont explosé leur génois ! Mon dieu, mon dieu, qu’on n’aimerait pas… ! Et hier, ici, au cap Maléas, nos voisins ont pris 54 nds, en quelques secondes !!
MONEMVASSIA… en lettres majuscules ! On vous a raconté Delphes, Olympie, Mystra, Méssenes, Methoni et beaucoup d’autres endroits magnifiques… mais ici, c’est encore un cran au dessus ! Monemvassia, la ville à " une seule entrée ", Malvoisie pour les Francs. Imaginez, venant par la mer, une île, un roc aux parois abruptes, genre de petit gibraltar, 300m de haut, relié à la terre par un pont étroit… à ses pieds, blottie coté Est, une vieille ville du Moyen-Âge, ceinte de remparts, et protégée par une citadelle qui occupe tout le haut de ce plateau rocheux.
Les Byzantins l’ont construit vers l’an mille, les Francs l’ont occupée, après un siége de 3 ans, en 1248, avec toujours notre Guillaume de Villehardouin, vous le saviez déjà… mais perdue en 1263, comme rançon de sa libération, vous le saviez aussi si vous suivez assidûment ! Puis se furent les Vénitiens qui retapèrent la citadelle et la ville haute et la ville basse, en alternance avec les Turcs qui restèrent bien longtemps jusqu’en 1821 ! Monemvassia est la 1° ville grecque à se libérer du joug turc… souvenez-vous la guerre d’indépendance commence en 1821 et se termine en 1828, grâce, entre autre, à la bataille navale de Navarino de 1827 !
Une promenade, en nocturne, dans les ruelles pavées, étroites, désertées, éclairées par quelques rares lampions, une autre, à l’aube avant que les marchands du temple n’aient ouvert leurs échoppes, avec un vent violent qui hurle dans les escaliers et les passages voûtés, une bonne grimpette à la citadelle abandonnée et en ruine… et nous nous sommes imprégnés de l’ambiance de Monemvassia pendant toute son histoire… et se fut un enchantement… majuscule.
Avec une pensée toute particulière pour mon père, pour mon cousin Jean et pour ma petite soeur Michelle.
Et des pensées affectueuses pour vous tous.
Yassas, salut !
Ah, avant de nous quitter, ça souffle encore à force 7, mais on est dans un port, en bonne compagnie, au pied du roc, et y a des cafés des tavernes et de la bière… alors on tiendra le coup !
JJ S
J’avais bien dit, la dernière fois, qu’on ferait attention à la météo…! Mais, ici, elle est imprévisible, je me répète… On part de Koroni pour traverser le golfe de Méssenie et doubler le cap Tainaro (ou Matapan)… au moteur… puis le vent monte, super ! On envoie GV (grd-voile) et génois… en plus on l’a dans le… dos ! Le pied ! On file à plus de 6 nds ! On se régale, sous un soleil qui ne nous quitte pratiquement pas depuis deux mois… (oui, je sais, ça vous énerve… mais prenez en votre part !)… puis ça monte encore… (force 6) plus de 20nds… 1 ris… 2ris… réduction du génois… nous voila à force 7… ça devient sportif mais reste amusant… le loch affiche jusqu’à 7,9 nœuds… la mer, à l’approche du cap est de plus en plus mauvaise, creuse, déferlante, une vraie marmite… le vent atteint des rafales à 8… là on s’amuse plus vraiment, bien qu’il n’y ait aucun danger, rassurez vous ! Et tout ça sous un ciel bleu imperturbable et un soleil radieux... mais on est bien content, le cap passé, d’entrer dans la petite baie de Porto Kayo sous 37 nœuds, et que la pioche accroche tout de suite ! Au milieu de tous les autres voiliers venus se blottir là. On a fait un excellente moyenne : + de 6,5…
Voila, ça, c’est pour les copains voileux, pour les mettre un peu dans le bain avec nous.
Pour vous autres, les terriens, sachez qu’on a abordé les côtes sauvages du Magne, arides, dénudées, toutes en montagnes pelées, couvertes d’un maigre maquis épineux et peuplées, si peu, de rudes montagnards, les maniotes. C’est la pointe du " milieu " sur votre carte du Péloponèse. On a voulu en savoir davantage. On remonte jusqu’à Gythion, le port de Sparte du temps de sa splendeur ! Location d’une petite voiture et découverte de ce rude pays. Imaginez des montagnes de rocailles, avec une pauvre végétation de buissons d’épines, quand la terre n’est pas carrément à nue, brûlée par les incendies. Et des villages, des hameaux plutôt, toujours juchés sur un piton rocheux, donc chaque maison est une tour, un véritable donjon de château fort, qui leur donne des allures de ksar marocain ou de château cathare, en pierres grises. Parce que, les maniotes, ils n’aimaient pas les étrangers, mais ils se supportaient entre eux, très difficilement, vivant en clan, avec un sens particulier de l’honneur, pratiquant la vendetta, et se tirant dessus d’une tour à l’autre ! Ca vous fait penser à la Corse, hein ? Celle d’avant, bien sûr ! Hé bien, justement, les Grecs installés à Cargèse, se sont des exilés maniotes du village d’Itilo, qui, persécutés par les Slaves ont demandé asile à la république de Gênes, alors maîtresse de la Corse ! (Pensée pour nos amis Michelle et Christian, amoureux de Cargèse… !)
Belle balade, émaillée aussi de superbes minuscules chapelles byzantines du 11° et 13°, aux fresques bien conservées, et de restes de châteaux francs construits par… ? Gagné ! Toujours notre Guillaume de Villehardouin !
Ah ! détails d’importance : le crin-crin incessant des cigales et les odeurs de maquis. Le Sud quoi !
Au retour les canadairs tournoyaient dans le ciel… ça brûlait dans les collines voisines !
A Gythion, il y a une petite île qui s’appelle Kranaï… Or, il y a bien longtemps, Pâris, fils de Priam, roi de Troie était reçu par Mélénas, roi de Sparte, marié à Hélène, superbe créature… Et, ce coquin de Pâris ne put résister au charme d’Hélène, et, enfreignant les règles les plus élémentaires de l’hospitalité et du savoir vivre, il la dragua ! Et elle trouva ça super ! Ils se sauvèrent de chez Mélénas, pauvre cocu, et leur première nuit d’amuuur se passa sur l’île de Kranaï ! C’est-y pas romantique ça ? Ouais, mais ça a déclanché la guerre de Troie, tout simplement !!
Puis Wadi Rum se rapproche de la dernière difficulté réputée… le passage du mythique cap Maléas… la pointe Est du sud du Péloponèse. Ulysse, lui-même en garde un mauvais souvenir… il rentrait chez lui, peinard, après voir fait du bon boulot pendant la guerre de Troie (justement !) quand, au passage de ce cap Maléas, le vent l’a envoyé au-delà de Cythère, vers le pays des Lotophages…
Et le scénario navigation raconté au début de ce chapitre se reproduit, pour aller de Gythion à l’île d’ Elafonissos, où il y a un mouillage sûr pour attendre que le vent donne son accord pour passer le cap Maléas vers l’Est. Wadi Rum arrive péniblement, par force 7, avec des rafales à 8, vent dans le nez pour le dernier bord, devant la superbe plage du sud de cette île… sable blanc, eau turquoise, mais décor de collines désertiques. Et ce putain de meltem qui souffle sans arrêt entre force 4 et 6 avec souvent des périodes à 7 ! .
Nous voilà donc au mouillage, l’ancre tient bon, heureusement, bien plantée dans le sable, car on va passer, au moins, 2 à 3 jours ici, balayés par un vent permanent établi, qui se calme à peine la nuit. Comme on est près du rivage, où se bronzent des beautés, mâles et femelles, nues (y en a pour tous les goûts !), il n’y a pas de vagues et le bateau accepte ce vent constant simplement en tirant des bords sur sa chaîne… On s’arme de patience et on attend une météo favorable… Et je ne tiens pas à quitter le bord, si ça montait encore plus pendant notre balade à terre, et que l’ancre chasse… !
Parce que c’est bien le meltem, un peu en avance cette année qui perturbe notre programme. On espérait faire un saut du Péloponèse à Milos, SW des Cyclades et remonter par Sifnos, Serifos, Kithnos et Kéa pour rejoindre le golfe Saronique et retrouver Malène et Hélène le 9 juillet comme prévu ! C’est loupé pour ce coup là, on longera donc, dès qu’on aura la permission de monsieur Meltem, le Péloponèse par Monemvassia, Nauplie, Spetsai, Idhra…
Enfin, à l’aube du 5° jour, Wadi Rum lève l’ancre. C’est vraiment l’aube, il est 5h du mat ! Comme prévu par la météo le vent s’est calmé, c’est au moteur qu’on progresse ; comme pas prévu par la météo, on passe ce fameux et redouté cap Maléas par un vent qui monte déjà, bien sûr, " in the nose " et on termine avec 25 nds, force 6, à Monemvassia, au lieu des 10 annoncés ! Ca ne facilite pas les accostages !
Maintenant on s’attend à tout avec le vent d’ici ! Des amis dans les Cyclades ont pris 60 nds, c’est force 11, ça s’appelle " violente tempête ", juste avant " l’ouragan " ! Et ils ont explosé leur génois ! Mon dieu, mon dieu, qu’on n’aimerait pas… ! Et hier, ici, au cap Maléas, nos voisins ont pris 54 nds, en quelques secondes !!
MONEMVASSIA… en lettres majuscules ! On vous a raconté Delphes, Olympie, Mystra, Méssenes, Methoni et beaucoup d’autres endroits magnifiques… mais ici, c’est encore un cran au dessus ! Monemvassia, la ville à " une seule entrée ", Malvoisie pour les Francs. Imaginez, venant par la mer, une île, un roc aux parois abruptes, genre de petit gibraltar, 300m de haut, relié à la terre par un pont étroit… à ses pieds, blottie coté Est, une vieille ville du Moyen-Âge, ceinte de remparts, et protégée par une citadelle qui occupe tout le haut de ce plateau rocheux.
Les Byzantins l’ont construit vers l’an mille, les Francs l’ont occupée, après un siége de 3 ans, en 1248, avec toujours notre Guillaume de Villehardouin, vous le saviez déjà… mais perdue en 1263, comme rançon de sa libération, vous le saviez aussi si vous suivez assidûment ! Puis se furent les Vénitiens qui retapèrent la citadelle et la ville haute et la ville basse, en alternance avec les Turcs qui restèrent bien longtemps jusqu’en 1821 ! Monemvassia est la 1° ville grecque à se libérer du joug turc… souvenez-vous la guerre d’indépendance commence en 1821 et se termine en 1828, grâce, entre autre, à la bataille navale de Navarino de 1827 !
Une promenade, en nocturne, dans les ruelles pavées, étroites, désertées, éclairées par quelques rares lampions, une autre, à l’aube avant que les marchands du temple n’aient ouvert leurs échoppes, avec un vent violent qui hurle dans les escaliers et les passages voûtés, une bonne grimpette à la citadelle abandonnée et en ruine… et nous nous sommes imprégnés de l’ambiance de Monemvassia pendant toute son histoire… et se fut un enchantement… majuscule.
Avec une pensée toute particulière pour mon père, pour mon cousin Jean et pour ma petite soeur Michelle.
Et des pensées affectueuses pour vous tous.
Yassas, salut !
Ah, avant de nous quitter, ça souffle encore à force 7, mais on est dans un port, en bonne compagnie, au pied du roc, et y a des cafés des tavernes et de la bière… alors on tiendra le coup !
JJ S
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